Débat à la mairie

Comment faut-il changer la loi ?

Présents :

Animation - M. Hoare ; Claude Reznik (Mairie de Montreuil), Pascal Winter et Geneviève Petauton (Copaf), Ali El Baz (ATMF et Gisti), Martine Flamant, directrice d’établissement Ile-de-France d'Adoma, Lionel Primeau, assistant d'Emmanuelle Cosse, vice présidente de la Région Ile-de-France et chargée du logement, une centaine d'autres militants, délégués, associatifs et résidents.


Déroulement :

Claude Reznik a excusé l'absence de Dominique Voynet, maire, tenue par d'autres engagements cet après-midi. Il a chaleureusement accueilli l'ensemble des résidents et délégués des foyers dans "leur" mairie. Il a rappelé que la Mairie de Montreuil s'est engagée avec d'autres élus pour le droit de vote des étrangers dans les élections municipales.


fete des foyers de montreuil pascal winter1 
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Pascal Winter a introduit la proposition de loi promue par le Copaf en quatre points : 1) la nécessité de renforcer les droits privés des résidents des foyers et des résidences sociales, de les aligner avec les droits des locataires ; 2) la nécessité de renforcer les droits collectifs des résidents, notamment leur droit à élire des délégués qui peuvent se constituer en comité de résidents, qui sont par la suite reconnus comme faisant partie des conseils de concertation 3) la nécessité d'imposer aux gestionnaires une co-gestion de la vie collective et des espaces collectifs des résidences 4) la nécessité qu'il existe des sanctions et des pénalités pour les gestionnaires qui refuseraient d'appliquer la loi.



Geneviève Petauton a fait un survol des problèmes du plan de traitement des foyers et de leur transformation en résidences sociales. Elle a rappelé que le programme date de 1997, qu'il devait prendre 5 ans. Nous sommes aujourd'hui 15 ans plus tard et 1/3 seulement du parc IDF a été réhabilité. Les foyers désignés comme les plus urgents, Bara et Rochebrune à Montreuil par exemple, n'ont toujours pas été touchés. Elle a ensuite rappelé le côté "rouleau compresseur" du modèle imposé, studio autonome pour tous avec des règlements absurdes qui imposent de grandes salles de bain pour personnes à mobilité réduite, gaspillage de l'espace et disparition ou réduction drastique des espaces collectifs, jugés non rentables selon les gestionnaires. Enfin, elle a demandé à l’État d'arrêter de faire le bonheur des gens malgré eux et contre eux. Il faut consulter, prendre en compte, assouplir le type de logement proposé et les modes d'occupation possibles.

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Ali El Baz a rappelé l'histoire de la carte de retraité, dont la communication politique en faisait une solution aux retraités qui retournaient vivre ou faisaient des aller-retours entre le pays d'origine et la France, mais qui en retour coupait les bénéficiaires de tous leurs droits médicaux et sociaux. Il a ensuite rappelé les règlements concernant les absences maximum du sol français pour pouvoir bénéficier de l’avis fiscal, de l’ASPA (appelée couramment minimum vieillesse) ou de l'APL, la campagne menée par le gouvernement Sarkozy contre la fraude et la manière dont les contrôles ont ciblé les vieux migrants des foyers. Il a fait état des situations de recouvrement qui poussaient les victimes au désespoir. Enfin, il a parlé de l’article de la loi qui devait instituer une aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine, article de loi voté par le Parlement et qui aurait permis aux retraités de vivre dans leur pays avec cette allocation (portant leur revenu au niveau de celui du minimum vieillesse) mais dont le décret d'application n'a jamais été publié.

Ali El Baz à la Fête des foyers de Montreuil, le 20 octobre 2012
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Claude Reznik à la fête des foyers de Montreuil, le 20 octobre 2012
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Claude Reznik
est réintervenu pour signaler l'histoire du foyer Bara, de l'absurdité des règlements concernant sa réhabilitation, règles érigés en dogme selon lui, et du fait que la ville de Montreuil ne pouvait pas à elle seule reloger l’ensemble des surnuméraires relogeables que compte le foyer. Il a plus tard fait part d'un message de Razzi Hamady, député de Montreuil, qui se dit prêt à porter devant l'Assemblée nationale les amendements proposés par le Copaf.




JBEyraud du DAL à Montreuil image J. Geering

Jean-Baptiste Eyraud de l'association Droit au Logement a situé la lutte des résidents des foyers dans le cadre plus général de la lutte pour le droit au logement. Il a rappelé que la crise du logement, les politiques de logement cher et d'incitation à la spéculation existent depuis une vingtaine d'années et que, naturellement, la situation dans les foyers en est en partie le reflet. Il indique le soutien du DAL pour les changements de loi proposés par le Copaf, mais insiste sur le fait que la lutte pour les réquisitions, la lutte pour faire appliquer la loi DALO sont aujourd'hui essentielles.







Martine Flamant
a tenu à distinguer ses positions personnelles et ce qu'elle pouvait dire en tant que directrice en fonction de l'Adoma. Elle a quand même exprimé son soutien à l'idée d'un statut égal à celui des locataires pour les résidents des foyers, la nécessité d'écouter les résidents et de renforcer les processus de représentation démocratique dans les foyers, la nécessité d'éliminer les situations de logement indigne et la nécessité de prendre en compte sérieusement les besoins des résidents âgés.


MartineFlamand
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Lionel Primeau
a rappelé l'appui qu'avait apporté Emmanuelle Cosse au projet de réhabilitation expérimental du foyer Centenaire-Pasteur. Il a exprimé le souhait que ce projet serve de modèle pour pouvoir expérimenter d'autres solutions aux problèmes de réhabilitation des foyers et que l’État cesse d'imposer des normes aussi rigides et peu adaptées aux souhaits des résidents.


LionelPrimeau
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AbdoulayeKanoute
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Abdoulaye Kanouté
a parlé de l'absence de respect envers les résidents que ce soit par les gestionnaires ou par les services de l’État. Il a insisté sur la nécessité de garder intactes les activités solidaires et collectives qu’elles soient dédiées au petit commerce, à l'artisanat et à la cuisine. Il a noté que la Préfecture avait refusé d'accepter une attestation de présence signée par le gestionnaire pour renouveler la carte de séjour. Les banques aussi imposent des conditions discriminatoires envers les résidents hébergés des foyers. Tout cela doit changer.





Youssouf Bakary Cissoko a parlé de la longue lutte des résidents du foyer Centenaire pour obtenir un relogement, lutte qui arrive aujourd'hui à son terme. Il a insisté sur le fait que malgré leur manque d'instruction, les immigrés des foyers étaient capables de faire beaucoup de choses quand on leur en laisse la responsabilité. Pour preuve, il a cité les 16 ans d'auto-gestion de la structure Centenaire, qui a été menée sans aide d'aucune instance extérieure par les seuls résidents et qui continue.


YCBakary
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Moussa Sylla
, ancien résident de Rochebrune, se pose la question de savoir si le droit de vote est une condition pour avoir la possibilité d'accéder à un logement social. Il dit aussi que les résidences sociales sont compliquées. Certes si on vient dans un pays, il faut accepter de vivre avec les autres. Mais si on veut décider de l'avenir d'une personne,
il faut consulter cette personne. Il dit que, même si on regarde ce qui se passe au Mali, on a l'impression que ce sont les autres qui décident à la place des citoyens, c'est humiliant. Ce qui se passe dans les foyers c'est similaire, du néocolonialisme.


MoussaSylla
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Issa Cissé, collectif des Sorins, dit que les foyers sont importants car nos personnes âgées (séniors) ont besoin d'être entourées par des plus jeunes. Il ne faut pas que l’État les oriente sur des structures où ils seront séparés des jeunes. Qui va les aider ? Mamadou Cissé, foyer Rochebrune. Puisque tout a été dit, comment va-t-on mener ce combat ? Je voudrais bien travailler en commun avec tous les délégués d’Île-de-France. Et avec la Mairie, car l'Aftam donne des informations à la Mairie qu'elle ne nous donne pas. Il y a toujours quelque chose d'ambigu dans nos discussions. Pour mener le combat, je compte sur vous.



IssaCissé image J. Geering


MamadouCisse image J. Geering


Deux jeunes habitants interviennent sur la situation au foyer La Noue, à la fois sur l'insécurité, la présence de prostituées, la mauvaise aération et l'état des sanitaires. Ils mettent en question l'application de la taxe d'habitation à des gens qui ne sont pas reconnus comme locataires. Et ils rappellent leur filiation à la première génération d'immigrés venus occuper les foyers dans les années 60 et qui ont toujours été méprisés et surexploités.

Samba Top, foyer Lenain de Tillemont. Il faut faire attention pour la rénovation du foyer Bara. D'une part les travaux peuvent être très mal faits, l’État, la Préfecture s'en désintéressent. Personne ne supervise. Ensuite les augmentations de redevances sont très fortes. Nous à l'Adef on paie les prix les plus chers au monde. Et je suis d'accord qu'il faut préciser le statut du conseil de concertation. Légalement, on ne peut rien faire avec un conseil de concertation, surtout pas convoquer le gestionnaire devant le tribunal.



LaNoue image J. Geering


SambaTop image J. Geering


Moussa Fofana du foyer Lenain de Tillemont insiste sur la difficulté de mobiliser les résidents, en particulier pour appuyer des changements dans la loi.

Pascal Winter reprend en disant que le changement de la loi permettra aux conseils de concertation et aux comités de résidents d'avoir plus de poids, d'être mieux reconnus, et que cela aura des conséquences sur toute la vie des résidences. C'est vrai que la taxe d'habitation comme l'assurance privée sont des exigences contradictoires avec le fait qu'on ne peut même pas faire une copie de sa propre clef. Même si on reconnaît dans les propos de Mme Flamant que les idées chez les gestionnaires ont bougé, il faut que des changements concrets et applicables à tous soient inscrits dans la loi.


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Lassana Niakaté de l'Association des Maliens de Montreuil insiste sur la nécessité de faire des réunions d'explication sur la proposition de loi dans les foyers pour mobiliser les résidents. Il pense aussi qu'on doit faire campagne pour le droit de vote des étrangers dans les élections locales. Il prend l'exemple d'un vieux migrant de 86 ans qu'il a accompagné l'année dernière et qui est aujourd'hui, à cause de sa méconnaissance des lois, sans papiers.

Sidy Doucouré du foyer Edouard Branly estime que si la mobilisation pour la Fête a été un succès, c'est parce que les foyers se sont mobilisés. Il faut continuer à mobiliser pour la loi, parce qu'on sait qu'aujourd'hui dans les foyers, il n'y a que des problèmes. On sait que l’Aftam fait très mal les réparations et les rénovations, et ensuite blâment les résidents pour les dégâts.



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SidyDoucouréDiamboueNiakate image J. Geering


Diambouy Niakaté, coordinateur des jeunes à Rochebrune, demande que les logements sociaux ordinaires soient plus accessibles aux résidents et aux surnuméraires des foyers. Beaucoup voudraient bien quitter le foyer mais s'ils n'entrent pas dans les possibilités offertes par le 1% patronal, il n'y a pas moyen. Il demande à la municipalité de bien examiner ce problème.

Samba Sylla, retraité, dit que depuis les années 70 on lutte pour l'amélioration des conditions de vie dans les foyers. Mais comment faire quand celui en face qui doit être ton partenaire ne te prend pas en compte. On sait que les rénovations ce sont des bricolages. Le mal, c'est qu'après 40 ans de travail et de luttes, on n'est pas reconnu.




Madikougné Konaté
rappelle que si nous demandons de nouveaux droits, il faut aussi nous préparer à prendre en charge nos devoirs. Cela nous interpelle nous les immigrés. Quand on vote, ça va demander une réponse cohérente et politique


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Fin du débat

Repas convivial, Dominique Voynet vient saluer les convives et percussion «Association Doumbelane ».




Doumbalane.